L’Hygiène de vie avant et après une greffe d’organes et de tissus

Conseils pratiques pour vivre mieux, plus longtemps

La greffe est bien plus qu’un acte chirurgical : c’est un nouveau départ qui implique des ajustements profonds du mode de vie. Une bonne hygiène de vie, avant comme après la greffe, joue un rôle essentiel dans la réussite du traitement et la prévention des complications. Voici nos conseils, répartis en plusieurs thématiques clés.

Préparer son corps et son esprit avant la greffe

Même si vous êtes en attente de greffe, vous pouvez agir dès maintenant pour optimiser les chances de réussite de l’intervention et du rétablissement.

🌿 Alimentation équilibrée : nourrir son corps intelligemment

Une bonne nutrition peut réduire les complications et améliorer la récupération post-opératoire.

Exemples concrets :

  • Préférez une assiette composée à moitié de légumes (brocolis, carottes vapeur, salade verte), un quart de protéines maigres (poulet sans peau, tofu, œufs) et un quart de glucides complexes (quinoa, riz brun, patates douces).
  • Si vous êtes en insuffisance rénale, votre néphrologue peut vous recommander de limiter les aliments riches en potassium (bananes, tomates, chocolat), en phosphore (produits laitiers) ou en protéines selon votre taux d’urée.

🏃‍♂️ Activité physique adaptée : bouger, même un peu, c’est mieux que rien

Le but est de conserver une bonne capacité cardiovasculaire et musculaire, sans épuiser vos réserves.

Exemples concrets :

  • 30 minutes de marche quotidienne à un rythme modéré.
  • Étirements doux chaque matin, ou une séance de yoga adaptée.
  • Pour les personnes en dialyse : exercices des jambes assis sur une chaise, 3 fois par semaine.

💊 Traitement et préparation médicale : ne rien laisser au hasard

  • Vérifiez votre statut vaccinal avec votre équipe médicale (grippe, hépatite A et B, pneumocoque…).
  • Suivez vos examens de suivi (prise de sang, échographies, etc.).
  • Préparez une trousse médicale ou un porte documents avec vos traitements, ordonnances, coordonnées d’urgence.

🧠 Accompagnement psychologique : anticiper le choc émotionnel

Attendre un greffon peut provoquer de l’anxiété, un sentiment d’impuissance, de la colère ou de la culpabilité.

Exemples concrets :

  • Échangez avec vos proches ou bien avec des associations de greffés  : ils comprennent votre vécu.
  • Suivre une psychothérapie ou bien une thérapie cognitivo-comportementale (TCC) peut vous aider à mieux gérer l’incertitude et les émotions fortes.
  • Tenez un journal personnel pour exprimer ce que vous ressentez.
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Les premières semaines après la greffe : vigilance maximale

La phase post-greffe immédiate (souvent les 3 premiers mois) est celle du plus grand risque de rejet ou d’infection.

💉 Traitement immunosuppresseur : votre pilier quotidien

Les anti-rejets sont vitaux, mais ils affaiblissent le système immunitaire.

Exemples concrets :

  • Si vous prenez de la ciclosporine ou du tacrolimus, notez l’heure de la prise et mettez une alarme sur votre téléphone.

     

  • Préparez un pilulier hebdomadaire et gardez une boîte de secours avec vous lors des déplacements (il vaut mieux être plus que prudent).

     

  • En cas de vomissements ou d’oubli, contactez immédiatement votre hépatologue ou ventre infirmier coordinateur.

     

🦠 Prévention des infections : les bons réflexes à adopter

Le risque infectieux est particulièrement élevé. Une rigueur quotidienne est nécessaire.

Exemples concrets :

  • Lavez-vous les mains au savon pendant 30 secondes après chaque sortie ou avant les repas.

     

  • Nettoyez régulièrement les poignées de porte, téléphone, clavier.

     

  • Évitez les buffets à volonté, les piscines publiques, les grands rassemblements durant les premiers mois. Votre système immunitaire étant affaibli, il est préférable de prendre ces précautions.

     

🍽️ Hygiène alimentaire stricte : mieux vaut prévenir que guérir

Exemples concrets :

  • Cuisez toujours la viande à cœur (pas de saignant).

     

  • Lavez les fruits et légumes à l’eau vinaigrée (1 cuillère à soupe de vinaigre blanc par litre d’eau).

     

  • Bannissez les sushis, les fromages au lait cru, les charcuteries artisanales non emballées, les préparations « faites maison » avec des oeufs crus (mousse au chocolat, mayonnaise etc…).

     

💬 Suivi psychologique et relationnel : ne restez pas seul(e)

Le « retour à la vie normale » peut être psychologiquement complexe.

Exemples concrets :

    • Il est fréquent de ressentir de la culpabilité envers le donneur ou de l’angoisse à l’idée d’un rejet.

       

    • Demandez à votre centre de greffe un suivi avec un psychologue spécialisé en transplantation.

       

    • Gardez un cercle de proches bienveillants. Éloignez-vous des relations toxiques, n’hésitez pas à faire le « tri » dans vos connaissances.

       

 

Vivre avec une greffe au long cours : équilibre et prévention

Votre greffe vous offre une seconde vie. Pour la préserver, quelques règles s’imposent.

🩺 Suivi médical régulier : votre meilleure prévention

Même si vous vous sentez bien, les complications peuvent être silencieuses.

Exemples concrets :

  • Vous pouvez ressentir un rejet sans symptôme visible (ex. : chute de la fonction rénale).
  • Des bilans réguliers (créatinine, bilan hépatique, échographies, biopsies) permettent d’agir vite.
  • Informez votre médecin de tout nouveau médicament (y compris les compléments alimentaires ou plantes médicinales comme le millepertuis, qui interfère avec les anti-rejets).

⚠️​ À savoir que le millepertuis peut être présent dans certains miel.

🏋️ Activité physique régulière : rester actif, c’est vital

Exemples concrets :

  • Reprendre la natation (en piscine propre, après cicatrisation complète).
  • Adopter le vélo d’appartement 2 à 3 fois par semaine.
  • Pratiquer la marche nordique ou le jardinage léger.

🍎 Maintenir une alimentation saine : attention au métabolisme

Certains traitements favorisent la prise de poids, le diabète ou l’hypercholestérolémie.

Exemples concrets :

  • Mangez un petit-déjeuner protéiné (œufs, pain complet, yaourt nature) pour limiter les fringales.
  • Préférez l’huile d’olive ou de colza aux graisses animales.
  • Buvez au moins 1 à 1,5 litre d’eau par jour (sauf contre-indication).

💉 Vaccination : se protéger, c’est protéger la greffe

Exemples concrets :

  • Un greffé pulmonaire doit être vacciné chaque année contre la grippe, et tous les 5 ans contre le pneumocoque. Les greffés sont appelés « immunodéprimés », il est donc essentiel de se rapprocher de son médecin pour savoir quel vaccin doit être fait.
  • En cas de voyage à l’étranger, informez-vous bien sur les vaccins requis ou interdits.

🌱 Équilibre mental et social : redonner du sens à sa vie

Exemples concrets :

  • Reprendre un emploi à temps partiel ou du bénévolat permet de se sentir utile.
  • Prendre soin d’un animal, démarrer un nouveau projet personnel, ou s’engager dans la sensibilisation au don d’organes et de tissus peut transformer cette expérience.

Conseils de prévention spécifiques à certains greffons

Certaines recommandations dépendent de l’organe greffé (rein, foie, cœur, poumon…) :

  • Rein : surveillance de la tension artérielle, du diabète, hydratation suffisante.

  • Foie : éviter l’alcool, contrôler les graisses dans l’alimentation, surveillance de la tension artérielle, du diabète, hydratation suffisante.

  • Poumon : importance capitale du sevrage tabagique, rééducation respiratoire.

  • Cœur : reprise prudente de l’activité physique, contrôle lipidique strict.

⚠️​ Demandez toujours à votre équipe soignante les conseils spécifiques à votre situation.

 

Les risques en cas de non-respect

Adopter une bonne hygiène de vie avant et après la greffe ne relève pas du simple « bon sens » : c’est une condition fondamentale pour protéger le greffon, sa santé globale, et sa qualité de vie. Sans dramatiser, il est important de comprendre les conséquences possibles d’un relâchement dans ces domaines.

⚠️ Avant la greffe : des risques évitables

1. Diminution des chances de réussite de la greffe

Un corps affaibli par une mauvaise alimentation, une inactivité prolongée ou une surcharge pondérale est moins apte à supporter l’intervention chirurgicale et la phase de récupération.

Exemple : un patient avec une masse musculaire très réduite ou une anémie sévère liée à une alimentation déséquilibrée peut avoir plus de complications post-opératoires et une récupération plus lente.

2. Infections ou contre-indications temporaires

Ne pas être à jour dans ses vaccinations ou présenter une infection non traitée peut entraîner un report de greffe, voire une perte d’opportunité si un organe ou un tissu devient disponible.

Exemple : un simple abcès dentaire non soigné peut constituer une contre-indication temporaire à la greffe.

⚠️ Après la greffe : une vigilance durable mais réaliste

1. Rejet du greffon

Le risque principal en cas de non-respect du traitement immunosuppresseur est le rejet. Celui-ci peut être aigu (brutal, dans les premières semaines) ou chronique (progressif, parfois silencieux).

Exemple : arrêter ou oublier ses médicaments anti-rejets pendant plusieurs jours peut entraîner un rejet aigu sévère, nécessitant une hospitalisation d’urgence et parfois une perte irréversible du greffon.

2. Infections graves

Avec un système immunitaire affaibli, des gestes simples comme manger des aliments crus ou fréquenter un lieu très fréquenté en pleine épidémie peuvent provoquer des infections graves, voire des hospitalisations prolongées.

Exemple : une infection au cytomégalovirus (CMV) mal prévenue peut provoquer de la fièvre, des douleurs abdominales, une forte déshydratation, une atteinte hépatique ou digestive.

3. Dégradation de l’état général

L’absence d’activité physique, une alimentation riche en sel ou en sucre, ou le tabac peuvent entraîner hypertension, diabète, surpoids… autant de facteurs qui fragilisent le greffon à moyen ou long terme.

Exemple : un greffé cardiaque sédentaire et fumeur augmente nettement son risque de récidive coronarienne ou d’insuffisance cardiaque, malgré la greffe.

4. Perte de qualité de vie

Outre les conséquences physiques, négliger le soutien psychologique ou les relations sociales peut favoriser un isolement, une perte de motivation, voire une dépression.

Exemple : un greffé qui ne se sent pas légitime à vivre après le don peut, s’il reste seul avec ses doutes, entrer dans une spirale d’auto-sabotage (oubli des médicaments, isolement, idées noires, perte de sens).

✅ Une bonne hygiène de vie, ce n’est pas viser la perfection, mais la régularité

Rassurez-vous : il ne s’agit pas d’être irréprochable tous les jours. Il est normal d’avoir des moments de fatigue, d’envie de relâchement. Ce qui compte, c’est la constance dans le temps, et la capacité à se remettre sur les rails si l’on dévie.

👉 Parlez-en sans tabou avec votre équipe médicale, vos proches ou des associations.
👉 Cherchez le bon équilibre entre exigence de santé et bien-être personnel.

 

Que faire si mon greffon ne fonctionne plus ?

Une situation difficile, mais pas sans solutions.

Recevoir un greffon est une grande chance, mais il arrive parfois — malgré toutes les précautions — que l’organe ou le tissu greffé cesse de fonctionner correctement. Ce n’est jamais une fatalité, ni une faute. L’essentiel est d’agir sans attendre, en restant bien accompagné(e).

🔍 Reconnaître les signes d’alerte

Il est important d’être à l’écoute de son corps, sans tomber dans l’inquiétude excessive. Voici des signaux qui doivent vous amener à contacter rapidement votre médecin ou votre centre de greffe :

  • Fatigue inhabituelle, persistante

     

  • Fièvre inexpliquée

     

  • Douleurs localisées au niveau de la zone greffée

     

  • Modification de la fonction (par exemple : baisse du débit urinaire pour un greffé du rein)

     

  • Prise de poids rapide ou gonflement (œdèmes)

     

  • Chute de la tension artérielle ou, au contraire, tension anormalement élevée

     

  • Modification des résultats d’analyse de sang habituels (créatinine, enzymes hépatiques, etc.)

     

⚠️ À noter : certains rejets ou dysfonctionnements sont silencieux. D’où l’importance capitale du suivi médical régulier, même si l’on se sent en parfaite forme.

🩺 En cas de doute : pas de panique, mais une réaction rapide

Si un problème est suspecté, votre équipe de greffe vous proposera des examens adaptés (prise de sang, biopsie, imagerie). Dans de nombreux cas, une réaction rapide permet de sauver le greffon.

Exemple : un début de rejet peut souvent être contrôlé par un ajustement des traitements immunosuppresseurs ou une courte hospitalisation.

Même en cas de dysfonction plus avancée, des solutions existent :

  • Changement de traitement

     

  • Interventions ciblées

     

  • Réhabilitation de l’organe greffé (dans certains cas)

     

  • Reprise d’un traitement de suppléance (dialyse pour un rein, assistance respiratoire, etc.)

     

  • Réinscription sur liste de greffe pour une retransplantation

     

💬 Ce que vous ressentez est normal… et mérite d’être écouté

Apprendre que son greffon ne fonctionne plus peut susciter un mélange d’émotions : tristesse, peur, colère, culpabilité… Vous avez le droit de ressentir tout cela. Mais vous n’êtes pas seul(e).

Parlez-en à :

  • Votre équipe médicale : pour comprendre, poser vos questions, être rassuré(e)

     

  • Un psychologue ou un psychiatre si vous en ressentez le besoin

     

  • D’autres personnes greffées qui sont passées par là : beaucoup ont connu une ou plusieurs greffes, et continuent à vivre pleinement

     

🌱 Une nouvelle étape, pas une fin

Même si la perte d’un greffon est un tournant, elle n’efface pas le chemin parcouru. Vous avez tiré profit de cette greffe, gagné du temps, de l’énergie, des moments précieux. Et il est possible d’envisager une nouvelle greffe si votre état de santé le permet.

Exemple inspirant : certaines personnes greffées vivent avec un second voire un troisième greffon. L’expérience acquise lors de la première greffe les aide à mieux se préparer et à mieux vivre les suivantes. Bien entendu, ces cas là sont très rares.

En résumé

  • Le dysfonctionnement d’un greffon n’est jamais une condamnation

     

  • Plus vous agissez tôt, plus les solutions sont nombreuses

     

  • Vous êtes entouré(e) d’une équipe et d’une communauté qui peuvent vous accompagner

     

 

En conclusion : vivre avec une greffe, c’est vivre pleinement, autrement

Adopter une bonne hygiène de vie avant et après une greffe, ce n’est pas seulement suivre des consignes médicales : c’est faire équipe avec son greffon, pour lui donner toutes les chances de durer, et à soi-même toutes les chances de vivre mieux et plus longtemps.

Chaque geste compte : un repas équilibré, une marche quotidienne, une prise de traitement à l’heure, un échange avec un proche, un suivi régulier… Tout cela n’est pas une contrainte, mais une façon de prendre soin de cette seconde chance.

Rappelez-vous : vous n’êtes pas seul(e). Les équipes médicales, vos proches, les patients greffés et leurs proches mais aussi la communauté de Maaarc sont là pour vous soutenir, vous écouter, vous informer.

Et surtout : vous avez le droit de vivre, d’aimer, de faire des projets, de douter parfois… mais surtout d’avancer, à votre rythme, avec confiance.